La longue réussite (10 ans) de la falsification de l’histoire que constitue le livre Survivre avec les loups illustre parfaitement la définition de la désinformation qu’en donne le Russe Sergueï Kara-Mourza dans son livre La Manipulation de la conscience (1) : « Nous pénétrons dans ton âme, dans ton inconscient, et nous te faisons vouloir ce que nous voulons que tu veuilles. »
Paru en 1997, Survivre avec les loups a été traduit dans 18 langues. Le film qui vient d’en être tiré en France par Véra Belmont (avec Guy Bedos) a totalisé, après cinq semaines d’exploitation, plus de 540.000 entrées.
Livre et film racontent « l’autobiographie vraie de Misha Defonseca », une petite juive bruxelloise de 8 ans qui, en 1941, équipée seulement d’une boussole, met le cap vers l’Est, à pied, en plein hiver, pour rejoindre ses parents déportés à Auschwitz et qui se retrouve en Ukraine à 3.000 Km de la Belgique. Durant son trajet, elle est adoptée par plusieurs meutes de loups, toutes également affectueuses. Elle reviendra en 1945 à son point de départ, cette fois-ci en passant par les Balkans et l’Italie. Avec, en prime, les plus incroyables épisodes, en particulier avec les loups.
Le livre pendant 10 ans et le film tout récemment ont fait l’objet des critiques les plus flatteuses dans les grands medias qui ont insisté sur leur caractère authentique et emblématique de cette période de l’histoire. Tout était réuni pour assurer le succès de l’œuvre : des attaques contre l’église catholique, la Shoah, les horribles nazis, les loups, etc.
Les rares spécialistes des loups qui se sont aventurés à prétendre que cette histoire était totalement impossible, en particulier le Dr Serge Aroles, se sont faits traiter de tous les noms. Il faut d’ailleurs noter que ces spécialistes des loups étaient des amateurs de la spécialité. Les professionnels, eux, se sont tus jusqu’à la révélation de la falsification, probablement pour ne pas risquer leur carrière en osant une suspicion aussi politiquement incorrecte.
La falsification de l’histoire opérée dans Survivre avec les loups durerait sans doute encore si « Misha Defonseca » n’avait intenté (et gagné) un procès à son éditrice américaine pour une mercantile histoire de droits d’auteur. Cette dernière, pour se venger, a fait des recherches sur l’identité de l’écrivain qui vit actuellement aux Etats-Unis. Elle à découvert récemment (et l’a publié sur un blog) que « Misha Defonseca » s’appelait en fait Monique De Wael, qu’elle n’avait rien de juive mais avait été baptisée dans la foi catholique par ses parents (certificat de baptême à l’appui) ; Et qu’en outre, au moment des faits relatés, elle était élève dans une école belge (photocopie du registre de l’école à l’appui) (2). Monique De Wael a alors été obligée, le 29 février 2008, d’avouer la falsification de l’histoire au quotidien belge Le Soir (3).
Nos enfants échappent ainsi à la projection obligatoire du film en clase de CM2, avec devoirs à faire en classe et à la maison sur le sujet (voir ci-dessous Guy Bedos.)
Bien entendu le Réseau Education sans Frontières (RESF) avait fait la promotion de ce « grand film qui nous montre avec force que l’histoire n’a pas de fin » (4), et avait fait la promotion du livre. Ce Réseau n’est pas à une désinformation près !
Si des millions de de lecteurs et de spectateurs sensés ont cru pendant 10 ans à ce livre et plus récemment à ce film, et ce malgré les incohérences énormes qu’ils contiennent, c’est parce qu’ils sont victimes sur ce sujet (comme sur beaucoup d’autres) de la désinformation : « Nous pénétrons dans ton âme, dans ton inconscient, et nous te faisons vouloir ce que nous voulons que tu veuilles. » Et depuis la révélation de la falsification, les déclarations et commentaires que l’on peut lire dans la presse et sur Internet démontrent que de nombreuses personnes sont toujours victimes de cette désinformation de leur esprit. Souvent, elles n’en veulent pas tellement à « Misha Defonseca » de les avoir trompées. Elles en veulent davantage à ceux n’y ont pas cru et qui les ont empêchés de « croire à ce que nous voulons que tu croies » !
Reste une inconnue. Guy Bedos, l’un des principaux acteurs du film, en a assuré une très importante promotion sur les plateaux de télévision. Il a proposé que l’on montre le film dans toutes les écoles de France. Guy Bedos est-il dans cette histoire :
- un désinformateur, comme il en a l’habitude,
- ou bien un désinformé, un idiot utile ?
Xavier Merlin pour Novopress France
(1) Paru en Russie en 2000. Non traduit en Occident. Il est intéressant de signaler que l’auteur, né en 1939, a bien connu de l’intérieur le communisme totalitaire soviétique et qu’il pense que la désinformation est moindre dans une dictature que dans une démocratie. Dans une dictature, le pouvoir n’a besoin que de l’acceptation par la majorité du peuple puisqu’il dispose par ailleurs de la force, du goulag. Dans une démocratie, le pouvoir a besoin de désinformer davantage de façon à obtenir l’approbation du peuple, et non plus seulement l’acceptation : « Nous te faisons vouloir ce que nous voulons que tu veuilles. » Le tyran a la bastille ; la démocratie a le poste de télévision, lequel a l’avantage non seulement de diffuser de la désinformation, mais d’occuper l’esprit de manière à empêcher une information plus objective. Dans La Désinformation vue de l’Est (Monaco, Editions du Rocher, collection Désinformation, 2007) Vladimir Volkoff se livre à une analyse critique de l’ouvrage de Sergueï Kara-Mourza.
(2) Voir le blog :
http://www.bestsellerthebook.blogspot.com(3) Voir également l’interview de l’auteur par Le Figaro.
(4)
http://www.educationsansfrontieres.org/?article10499